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Nous vous proposons quelques strophes tirées des Divins élancements d’amour composés par Claude Hopil et parus pour la première fois en 1629. On ne connaît presque rien de la vie de ce poète mystique du XVIIe siècle, en dehors du fait qu’il se revendique « Parisien » sur la page de titre de l’un de ses ouvrages et qu’il est probablement né vers 1580 et décédé après 1633. Très marqué par l’influence de Denys l’Aréopagite, dont le corpus avait été traduit en français par Goulu en 1608 et 1629, Claude Hopil participe activement au renouveau du langage mystique du XVIIe siècle.
Parmi ses ouvrages nous rappelons en particulier les Œuvres chrétiennes avec un mélange de poésie (1603) et Les Douces extases de l’âme spirituelle (1627). Mais laissons la parole à ce « poète de l’ombre et de la lumière », comme le définissait Jean Rousset, et lisons ces cantiques :
Dites, qu’est-ce que Dieu ? Je ne saurais le dire,
J’en pense quelque chose, et je ne sais que c’est,
N’étant ce que j’estime, il est celui qui est,
Je puis (non ce qu’il est, mais ce qu’il n’est, écrire)
Non, je n’en pense rien en ce terrestre lieu :
Car en lui tout est Dieu
(Cantique II,1)
***
Etant dans le cachot de mon néant couché
Je cherche ce grand Dieu que j’ai longtemps cherché
Sans avoir connaissance
De son être excellent ; afin de l’entrevoir
Il ne faut le chercher par esprit et savoir
Mais par simple ignorance
(XXXVIII, 1)
***
Dans l’abîme divin mon âme est engloutie,
Je crois que la pauvrette est en Dieu convertie,
Car je ne la vois plus,
C’est une goutte d’eau dans la mer répandue ;
Quelle bonté de Dieu ! car l’âme en soi perdue
Se retrouve en Jésus.
(LXXXV, 1)
***
Contemplant dans mon rien, ce tout sans qui mon être
Ne pourrait subsister un seul petit moment,
Touché du S. Esprit j’entre en ravissement,
Et désirant connaître
Cet un qui me ravit, de l’esprit et du cœur
Le mystère est vainqueur
(Cantique VII, 5)
***
Quel abîme je vois ! Mon âme s’épouvante !
Elle est anéantie, et ne peut subsister !
Un esprit dévorant, l’esprit me vient ôter,
J’en vois trois en un seul, unité ravissante !
Je ne puis plus durer dans mon être imparfait,
Je meurs pour le parfait
(VIII,1)
***
Je ne sais où je suis, ni qui je suis encore,
Je ne sais ce que je fais, tant l’objet me dévore
Sans le voir nullement ;
Je pense que c’est Dieu, je ne vois pas sa gloire,
Touché de son amour, je n’ai cœur ni mémoire,
Esprit ni jugement.
(XV, 7)
Claude Hopil, Les divins élancements d’amour (1629), Grenoble, J. Millon, 2001
[Afin de rendre accessibles au lecteur ces strophes du XVIIe siècle nous avons modernisé l’orthographe]